Se connecter
BLOOD MACHINES : LE CHOC VISUEL & SONORE
28 août 2020 - 17:45
Blood Machines c’est le film de SF digne des grandes pages de la revue Heavy Metal, réalisé par Raphaël Hernandez et Savitri Joly-Gonfard les deux hommes derrière Seth Ickerman !
Blood Machines c’est un hommage à un cinéma d’auteur (oui, c’en est bien un !), celui de Seth Ickerman, qui nous offre une plongée aussi rare qu’étonnante dans un univers de Space Opéra, qui emprunte autant à la pop-art certaines couleurs et certains effets lumineux ou d’ondulations, qu’à cette imagerie vieille et rouillée quand elle n'est pas techno-archéologique, à laquelle Star Wars ou Matrix par exemple avaient pu nous habituer.
Un connaisseur de l’univers Warhammer 40 000 ne serait pas si dépaysé que ça en étant confronté à ces arcanes technologiques, cette fusion entre la machine et l’homme, ou tout simplement cette quête spirituelle. Aussi ce sont maintes images et références quasi simultanées qui nous frappent à la vision de ce moyen métrage. Blood Machines est un film « monumental », né d’un projet osé et d’une vision aussi esthétique qu’artistique assumée par son duo de réalisateurs. Pourtant « monumental » pourrait sembler exagéré, mais à peine 50 minutes d’un métrage ambitieux et original nous prouvent le contraire !
Bien sûr il paraît évident de le comparer à des œuvres fortes qui seront autant de repères comme Blade Runner et sa réflexion sur la nature de l’homme (et le répliquant), et la place de la femme ; car ce film est un magnifique hommage à la femme, à sa force ; et nous offrira quelques unes des plus belles visions de corps féminins sans qu’à aucun moment cela ne soit ni déplacé, ni d’une utilisation exagérée. Et indéniablement c’est Matrix qui nous viendra à l’esprit dans ce rapport à la machine, cette recherche de la fusion parfaite - allez savoir ! - et ces visions de vaisseaux sales, presque « cradingues ». Bien sûr aussi, on peut penser aux films Live de Mamoru Oshii avec cette recherche de la perfection visuelle, à ces films souvent parfaitement mis en image, mais au détriment d’un scénario soit trop faible, soit trop compliqué.

Mais aux yeux du spectateur, à aucun moment Blood Machines ne verse dans les excès ni les facilités tant son script est rigoureux, sa mise en scène impeccable et ses acteurs crédibles ; avec cet univers, comme évoqué au tout début, parfaitement cohérent. Si les influences réelles du film sont par contre assez compliquées à trouver, j’oserai bien quelques « supputations » concernant Moebius (l’incal notamment), et la vague d’illustrateurs des années quatre vingt, avec ce sens de l’organique et du métal. On pourrait parler de Giger et du bio-mécanique, mais en fait nous en sommes loin. La sensibilité ici nous rapprocherait de la défunte revue Heavy Metal ; ces histoires de machines incroyables, de camionneurs de l’espace, de femmes superbes et indépendantes…
Mais Blood Machines c’est aussi cette fusion son et image que le film entretient avec la musique de Carpenter Brut et qui en fait un objet à part entière, métrage soutenu par une musique puissante et inventive. Les réalisateurs auront travaillé en soumettant les scènes au compositeur, ce dernier travaillant souvent d’après peu de choses et leur soumettant en retour des idées, des recherches. Nul ne saurait dire si cette collaboration ouvrira certaines portes à Carpenter Brut, en admettant par ailleurs que cela puisse être une voie qu’il souhaite emprunter ; mais quoiqu’il en soit, il démontre une sensibilité et une vision qui profite au film, renforçant son identité et sa présence.

Blood Machines c’est enfin et surtout des amoureux du cinéma et du fantastique, des artistes qui décident de travailler à l’ancienne avec des décors, des maquettes et des effets de projection de lumières sur le plateau, quand bien même la 3D est omniprésente ! Au final ce film est du pur bonheur pour les yeux, avec en fond une histoire qui laisse la part belle à la spiritualité et à cette ébauche de dimension différente.
Et pour les grincheux de tout genre, ce n’est pas un clip vidéo de cinquante minutes ! - Non, c’est un film doté d’un vrai budget et qui n’aura pas à rougir de la comparaison avec une production hollywoodienne !
Nous reviendrons dans un autre article sur le « Making-Of » de cette réussite française, qui - souhaitons-le en tout cas - sera un pied de nez à ces producteurs frileux, à ces décideurs qui n’osent aller que vers ces éternelles recettes de films à la « Française » sans envergure et bien souvent trop répétitifs.



